Les chansons
Elle est douce la voix du jeune veau
et celle de la vache;
les chants de la syrinx sont doux
et ceux du bouvier et les miens aussi.
Théocrite
Prends l’herbe desséchée, par le soleil pâlie,
Et la gerbe qu’on lie,
Prends l’eau pure et le vent et la tiède saison
Et fais-en des chansons;
Prends cette éclosion des œufs de la fauvette
Sous l’épine-vinette
Et le troène en fleurs aux candides frissons
Et fais-en des chansons.
Prends les sainfoins penchant leurs épis de rubis,
La toison des brebis,
Dont la blancheur s’accroche aux caressants buissons,
Et fais-en des chansons.
Prends le grenier profond plein de toiles d’araignes,
Où du soleil flou stagne,
Sur les blés en monceaux, les mortes fenaisons
Et fais-en des chansons.
Le fumier triomphal, où le coq est perché,
Et le purin taché
Par l’or incarnadin qui fuit des horizons
Et fais-en des chansons;
Les cochons fouissant aux fanges qui se dorent,
Les roses de l’aurore
Et la mare boueuse aux verdâtres cressons
Et fais-en des chansons.
Prends le rire sournois des gués et des fadets,
Dans les bois violets,
Où la lune tombant montre son masque blond
Et fais-en des chansons.
Prends l’écluse, parmi le soir, vibrante harpe,
A la flottante écharpe;
Le moulin radoteur et son troupeau d’oisons
Et fais-en des chansons.
Assieds-toi comme un pauvre au seuil bleu de la nuit
Près des lys et du puits,
Prends leurs charmes divers et leurs exhalaisons
Et fais-en des chansons.
Pâtre, joueur de flûte, enfin prends ta douleur,
Son amère rumeur
De source ténébreuse en fuite sous les joncs
Et fais-en des chansons.
The songs
It is sweet, the voice of the young calf
and that of the cow;
the chants of the pan-pipe are sweet
and those of the cowherd and mine as well.
Theocritus
Take parched and withered grass that the sun has turned pale,
And sheaves pressed to a bale,
Take pure water, warm weather and the wind that blows
And from this songs compose;
Take this fresh batch of warbler’s eggs hidden by fruits
Of the barberry shoots,
And the flowering privet that quick shivers knows
And from this songs compose.
Take the sainfoin stems holding up heads of cerise,
And the ewes’ heavy fleece
With its whiteness that snags on the bushes’ tight rows
And from this songs compose.
Take lofty old attics where cobwebs congregate
And blurred sun’s rays stagnate,
Where corn in piles and silage slowly decompose
And from this songs compose.
The triumphant dung-heap, where the cock now reigns,
And the slurry with stains
Of gold incarnadine that from horizons glows
And from this songs compose;
The rooting pigs that gild themselves in oozing mire,
Dawn roses set on fire
And the old muddy pond where green watercress grows
And from this songs compose.
Take the devious laugh of heathland and of fords,
And violet woods’ swards,
Where the moon as it falls its blond mask slowly shows
And from this songs compose.
Take the sluice when evening has come, a vibrant harp
With its long floating scarf;
The incoherent mill and the goslings’ hoarse prose
And from this songs compose.
Sit at the night’s blue threshold by lily and well,
Where you as poor man dwell,
Take in their diverse charms and scents that there repose
And from this songs compose.
Shepherd and flute-player, take finally your pain,
Its bitter mumbling strain
Of a shady spring whose swift flight the reeds oppose
And from this songs compose.
No comments:
Post a Comment