Je m’abandonne
Je m’abandonne à l'odeur des forêts obscures,
Sève amère suintant des troncs,
Qui s’appuie à ma lèvre ainsi qu’une morsure,
Caresse mes yeux et mon front.
Comme au supplice aimé des baisers qu’on endure,
Trop lents, trop lourds et trop profonds,
Je m’abandonne à l’âpre effluve qui sature
La vase des étangs que l’automne corrompt.
Je m’abandonne aux frissons de la solitude,
Soupirs enamourés de Pan
Me poursuivant et m’étreignant, furtif et rude;
Aux senteurs des ruisseaux soudain m’enveloppant:
Aux émanations à leur bord qui s’effrite
Des mousses que presse ma main,
De leurs flocons crispés où ma caresse hésite
Et s’alentit et croit frôler un torse humain.
Tout un sursaut d’amour tremble aux feuillages d’ambre,
Leur parfum viole ma bouche
Et se glisse en ma chair et frémit dans mes membres;
Fauve et brutal, un dieu m’attire vers sa couche;
Et flairant sa présence à cette odeur sauvage
Des lichens rouillés et des sorbes,
J’accueille son désir, où mon désir s’absorbe
Et cède tout entière à l’élan qui m’outrage.
15 Novembre.
I surrender myself
I surrender myself to the dark forests’ scent,
The seeping sharp sap from each bough,
Which presses on my lips like bites that won’t relent,
Caresses my eyes and my brow.
Like the torment of kisses that fail to elate,
Too slow, too heavy and too deep,
I surrender to harsh odours that saturate
The sludge in ponds that autumn rots and then lets seep.
I surrender to the shudders of solitude
And sighs of Pan desiring me,
Pursuing me and grasping me, furtive and crude;
To scents of streams enveloping me suddenly:
To mosses’ aromas crumbling under duress
When squeezed intensely by my hand,
And their tight-knit fleeces, unnerving my caress,
Which slows as if stroking the torso of a man.
A burst of love quivers in amber leaves’ thin skins,
Their potent perfume rapes my mouth
And slides into my flesh and quivers in my limbs;
Brutal and raw, a god now draws me to his couch;
And sensing his presence in this wild, savage scent
Of rust-coloured lichens and sorbs,
I welcome his desire which my desire absorbs
And yield now to the rush this outrage will augment.
15 November
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