Au jardin
A Marguerite Lemaire
Le brouillard imprécis dont le jardin se farde
Rase les bordures de buis. Par les sentiers
S'étire sa splendeur frêle où du jour se carde
Et pend en flocons d'or aux tremblants coudriers.
La saveur des œillets et des roses musquées
Rôde languissamment dans le soir violet;
Saveur imperceptible et partout embusquée
Sous les buissons mouillés, parfums doux des fruits.
Respirons cette haleine verte après la pluie
Des groseilliers, des coins mûris et des cassis,
Des feuilles de panais que le vent fraie essuie,
Le relent des pollens gluants, l'odeur des lis.
Respirons, sous l'ombrage épais, l'odeur des prunes,
Qu'on aperçoit, entre les feuilles, dans leur fleur
Délicate, et peintes d'un bleu de clair de lune,
Juteuses et tombant de l'arbre au moindre heurt.
16 octobre 1901
In the garden
To Marguerite Lemaire
The blurring mist with which the garden lards itself
Hugs boxwood borders close. And via the pathway frieze
Extends its fragile splendour, where day cards itself
And hangs in flakes of gold to trembling hazel trees.
The savour of carnation and of musky rose
Roams languidly in evening’s violet haze so mute;
A savour never sensed and ambushed where it flows
Beneath the bushes moist and damp, sweet scents of fruit.
Let us breathe in this breath of green that follows rain
Of gooseberries, blackcurrants, quince that’s ripened well,
Of parsnip leaves the fresh wind cleans of earth again,
The scent of sticky pollens, lilies’ powerful smell.
Let us breathe in the smell of plums beneath full shade
Which one can glimpse among the leaves, their bloom of such
Refinement, with the blue of moonlight now arrayed,
Juicy and falling earthwards at the slightest touch.
16 October 1901
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